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Santé

Hyperandrogénie, et si prendre du poids était la solution ?

Hyperandrogénie et poids insuffisant ? Derrière ce titre volontairement provocateur, se cache en réalité une problématique très courante, que je rencontre très souvent au cabinet.

Quand on parle d’hyperandrogénie clinique, on pense aux symptômes physiques suivants : acné, hyperpilosité dans des endroits peu courants chez la femme (hirsutisme), peau grasse ou cheveux gras (hyper séborrhée) et chute de cheveux (alopécie androgénétique).

Le raccourci est souvent fait : qui dit hyperandrogénie physique, « clinique », dit forcément hyperandrogénie « biologique », soit un excès d’hormones androgènes, aussi appelées « hormones masculines » (on pense par exemple à un excès de testostérone).

On imagine alors que ces fameuses hormones masculines sont produites en excès et qu’il faut à tout prix les réduire…  

La réalité est en fait beaucoup plus complexe que cela… Des symptômes physiques d’hyperandrogénie ne sont pas toujours en lien avec un excès de production d’hormones androgènes. Accrochez vos ceintures, je vous explique cette vérité nuancée et parfois contre- intuitive !  

Si vous vous reconnaissez dans les symptômes décrits dans cet article et que vous souhaitez retrouver un équilibre hormonal, n’hésitez pas à prendre RDV en naturopathie/micronutrition.

Les androgènes, qu’est-ce c’est ?

Les androgènes appartiennent à une grande famille, ils existent sous 4 formes :

  • La testostérone
  • La delta 4 androstènedione
  • La déhydroépiandrostérone (DHEA)
  • La dihydrotestostérone (DHT)

Chez la femme, l’origine des androgènes est double avec une synthèse et une sécrétion par les ovaires et les glandes surrénales.

A l’équilibre, les androgènes participent entre autre à une bonne libido, la confiance en soi et la motivation, la fonction cognitive et la mémoire, la protection cardio-vasculaire, la qualité de la peau, des os et des muqueuses, la qualité musculaire, le métabolisme.

Lorsqu’ils sont produits en excès, certains symptômes très handicapants chez la femme peuvent apparaître…

L’hyperandrogénie liée à un excès d’hormones androgènes

Lorsqu’ils sont produits en excès, on peut alors souffrir de symptômes d’hyperandrogénie. J’ai détaillé ce mécanisme et le rôle des hormones androgènes dans cet article.

Cette production excessive d’hormones « masculines » donnera lieu à des symptômes physiques caractéristiques mais également à une hyperandrogénie biologique, que l’on pourra confirmer par un bilan hormonal (bilan sanguin à réaliser avec son médecin).

Plusieurs pathologies peuvent expliquer cette production accrue d’hormones, on peut citer par exemple :

Mais alors, comment expliquer des symptômes physiques d’hyperandrogénie, comme l’acné ou la pilosité par exemple, sans excès d’hormones androgènes ?

L’hyperandrogénie, quand la cause n’est pas liée à un excès d’hormones masculines mais à un déficit en hormones féminines

Si vous me lisez régulièrement, vous savez probablement que lorsque l’on parle d’hormones, tout est question d’équilibre.  Un excès d’hormones androgènes peut effectivement être la cause de symptômes d’hyperandrogénie mais un déficit d’hormones féminines aussi !

C’est donc bien la balance entre les hormones masculines et les hormones féminines qu’il faut évaluer.

Les hormones féminines dont je parle ici sont la progestérone et les œstrogènes (dont j’ai déjà détaillés les rôles dans 2 articles dédiés).

Equilibre hormonal chez la femme

Les hormones féminines vont en quelque sorte « contrebalancer » et moduler l’effet des androgènes.

Essayons d’y voir un peu plus clair dans ce fameux équilibre hormonal féminin, à travers les 3 exemples schématiques suivants :

Différents climats hormonaux chez la femme

Quelques exemples en lien avec l’équilibre hormonal féminin

  • Cas 1 : chez cette femme, il y a un bon équilibre entre les hormones masculines et les hormones féminines. Dans cet exemple, on peut imaginer qu’il n’y aura pas de symptôme d’hyperandrogénie.
  • Cas 2 : chez cette femme, il y a bien un excès d’hormones masculines (hyperandrogénie biologique) qui pourra probablement occasionner des symptômes d’hyperandrogénie.
  • Cas 3 : enfin, dans ce dernier exemple, les androgènes sont normaux (ils pourraient même être légèrement bas, ça ne changerait pas ma conclusion) et les hormones féminines sont effondrées. Dans ce cas-là, il pourra également y avoir des symptômes physiques d’hyperandrogénie. On parle alors d’hyperandrogénie relative (relative par rapport aux hormones féminines si basses !). Retenons également que lorsque toutes les hormones sont basses, autant les androgènes que l’estradiol ou la progestérone, on retrouvera souvent des symptômes d’hyperandrogénie.  D’une façon imagée, on pourrait dire que lorsque tout est bas, « le masculin l’emporte sur le féminin ».

Maintenant que nous avons compris que les symptômes physiques d’une hyperandrogénie ne sont pas forcément liés à un excès d’hormones mâles, essayons de faire le lien avec le poids et en particulier un poids bas.

Production des hormones féminines

Quelques petits rappels sur le cycle féminin :

  • Le cycle féminin naturel est orchestré avec 2 hormones star : l’estradiol (qui fait partie de la famille des œstrogènes) et la progestérone.
  • En première phase du cycle, c’est en grande partie la production suffisante d’estradiol qui permet à la femme d’ovuler correctement.
  • Lorsque l’ovulation est qualitative, la progestérone sera bien sécrétée. Si l’ovulation n’a pas lieu ou qu’elle est peu qualitative, il n’y aura pas ou très peu de progestérone.
Cycle ovulatoire de la femme

Ainsi, l’équilibre hormonal de la femme repose donc sur une bonne pondération entre les hormones masculines et féminines, qui dépendent elles-mêmes d’un bon cycle ovulatoire.

Autrement dit, sans un cycle féminin harmonieux, il ne peut pas y avoir d’hormones en équilibre… Et selon vous, qui est l’un des principaux ennemis du cycle féminin… ? 🥁

Un poids insuffisant !  

Poids insuffisant, hyperandrogénie et déficit en hormones féminines

Le corps humain est une machine extrêmement intelligente, et de façon très simplifiée, on pourrait dire que s’il n’y a pas assez de « nutriments dans les tuyaux », le corps se met en « sécurité », en pilotage « automatique », en « économie d’énergie ».

Un cycle féminin harmonieux et équilibré aboutit chaque mois à une ovulation, qui elle-même peut aboutir à une grossesse. Grossesse, qui est très énergivore pour le corps…

Lorsqu’une femme a un poids trop bas, les sécrétions d’hormones féminines peuvent diminuer peu à peu. Le corps d’une certaine manière se protège, s’économise et évite ainsi à la femme une grossesse qui serait difficile à mener à terme.  

Cette diminution en hormones féminines pourra entrainer une hyperandrogénie relative (cf. cas 3 du précédent exemple), avec des symptômes physiques d’hyperandrogénie.  

Hyperandrogénie relative et poids insuffisant

Lors de mes consultations, je rencontre souvent des femmes très minces dont l’équilibre hormonal est perturbé, avec des signes d’hyperandrogénie mais sans excès d’hormones masculines.  

Vous l’aurez compris, dans ces cas-là, la solution repose essentiellement sur une prise en charge permettant d’atteindre un poids « physiologique » via l’alimentation et l’adaptation de l’activité physique, si celle-ci est trop intense.

Voici le profil « type » de femmes minces qui peuvent être sujettes à ce type de déséquilibre :

  • Femme mince, menue (voire maigre) avec un IMC bas ou normal.  
  • Souvent, il y a un antécédent de Trouble de la Conduite Alimentaire (TCA) mais cela n’est pas systématique
  • Personnalité souvent perfectionniste
  • Cycles longs, règles peu abondantes ou absentes (aménorrhée), cycles anovulatoires, infertilité
  • Recherche consciente ou inconsciente d’être dans l’hypercontrôle de son alimentation, la recherche d’un déficit calorique, la présence de restrictions alimentaires, la limitation importante des glucides et/ou lipides.
  • Il peut y avoir également une activité physique intense.

Une alimentation insuffisante et/ou une activité physique trop intense participeront à ce qu’on appelle le déficit de la balance énergétique et entraineront des déséquilibres hormonaux (dont notamment la diminution des hormones féminines). Ces déséquilibres hormonaux pourront eux – mêmes être à l’origine de troubles du cycle féminin (règles absentes, cycles longs, règles très peu abondantes, infertilité, sécheresse intime, etc ) et entrainer des signes d’hyperandrogénie.

Dans les cas les plus extrêmes, ce déficit de la balance énergétique pourra entrainer une anorexie et/ou aménorrhée hypothalamique.

Quelques réflexions supplémentaires sur le déficit de la balance énergétique et l’équilibre hormonal féminin :

  • Le poids « idéal » qu’une femme perçoit d’un point de vue « esthétique » est parfois très éloigné du poids « idéal pour sa santé », de son équilibre hormonal et de son cycle féminin. Il y a parfois un décalage de 2, 5, 10 kg …
  • La présence de masse grasse est indispensable pour produire des œstrogènes. En effet, c’est dans le tissu adipeux (= tissu gras) qu’une enzyme, l’aromatase, est produite et aura comme super pouvoir de transformer la testostérone (un androgène) en hormone féminine !
  • Les restrictions alimentaires, notamment en graisses peuvent impacter le cholestérol. Or, le cholestérol est la matière première à partir de laquelle toutes nos hormones sexuelles sont produites ! Si l’on manque de cholestérol, cela peut creuser encore davantage les déséquilibres hormonaux.
  • Un poids insuffisant fera le lit de bien des problématiques de santé. J’évoque dans cet article essentiellement le scope de l’équilibre hormonal sexuel, mais il y aura évidemment d’autres risques : impact sur la santé osseuse, mentale, dentaire, sur la santé thyroïdienne, possibles carences alimentaires, chute de cheveux, et impact sur les capacités reproductives futures.

Mon expérience chez les consultantes minces qui présentent des signes d’hyperandrogénie, sans excès d’hormones masculines

Trop souvent, je rencontre des femmes minces qui viennent me consulter avec un diagnostic de SOPK, sans avoir effectué de bilan hormonal complet.

En réalisant mon anamnèse, je constate très souvent que leurs profils s’apparentent davantage à une hyperandrogénie relative par manque d’hormones féminines, liée à un déficit de la balance énergétique, qu’à un « vrai SOPK ».

L’erreur est facile et les raccourcis sont vite faits.  En effet, ces femmes présentent plusieurs symptômes qui ressemblent à s’y méprendre au SOPK : signes d’hyperandrogénie (acné, piloté par exemple), cycles très irréguliers, parfois une imagerie qui révèle des ovaires riches en follicules.

Je rappelle que le diagnostic du SOPK est un diagnostic d’exclusion avant tout. Il faut IMPERATIVEMENT vérifier si une autre pathologie ou déséquilibre hormonal pourrait expliquer les symptômes avant de plonger « tête la première » dans le diagnostic du SOPK.

Dans ces cas, je propose de pousser les investigations sur le plan hormonal avec des médecins spécialisés… et la piste de SOPK est très souvent écartée !

Si le sujet vous intéresse, Lara Briden a justement publié un post en anglais très intéressant sur le sujet, intitulé : SOPK ou sous alimentation ?

Notes sur le lien entre Hyperandrogénie et poids insuffisant :

  • Attention, toutes les femmes minces n’ont pas forcément de déséquilibres hormonaux avec une hyperandrogénie relative par manque d’hormones féminines !
  • J’évoque dans cet article l’intérêt pour les femmes minces ou avec IMC « normal » d’atteindre un poids physiologique pour leur bon équilibre hormonal. Evidemment, en cas de surpoids, on n’encouragera pas les femmes à augmenter leur IMC, le surpoids favorisant l’hyperandrogénie par plusieurs mécanismes comme l’inflammation et la résistante à l’insuline.
  • J’ai énormément simplifié et vulgarisé cet article pour qu’il soit digeste et accessible au plus grand nombre… mais il y a évidemment des mécanismes, à l’origine de l’hyperandrogénie, plus complexes que je n’ai pas détaillés ici. Je pense en particulier à la résistance à l’insuline, à la SHBG, à la sensibilité des récepteurs aux hormones, aux individualités génétiques, etc…
  • Idem, lorsque j’évoque les « ennemis du cycle féminin », je parle ici d’un faible poids et du déficit dans la balance énergétique mais il y’en a beaucoup d’autres en réalité !
  • Il est important de rappeler que chaque cas est unique et qu’il est essentiel de consulter un médecin pour obtenir un diagnostic précis et un traitement individualisé.

Vous êtes professionnel(le) de santé et vous souhaitez approfondir votre compréhension de l’hyperandrogénie, n’hésitez pas à embarquer pour notre prochain mentoring sur l’équilibre féminin.

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